Alors que la direction de La Redoute a annoncé l'externalisation des 322 emplois de l'entrepôt Quai 30 de Wattrelos dans le Nord, la section syndicale FO se bat pour des mesures sociales dignes. Des négociations sont en cours.
Nous sommes déterminés
, annonce Nordine Ouali, DS FO au sein de La Redoute. C'est bien simple, on ne peut tout simplement pas lâcher alors que le transfert est prévu pour le 1er juin.
Cette date butoir, la direction de l'entreprise l'a annoncé aux 322 salariés du site de logistique qui travaillent à l'entrepôt Quai 30, à Wattrelos (59). Les emplois seront externalisés, transférés à l'entreprise ID Logistics. Celle-ci dépend de la convention collective des Transports. Or, jusqu'à présent, les salariés du Quai 30 dépendait de la convention de la Vente à distance. Le transfert vers ID Logistics, On nous l'a annoncé de but en blanc, lors d'un CSE extraordinaire le 6 février dernier
, explique le militant.
Pendant plus d'un mois, la direction a refusé des négociations, tandis que la section FO – soutenue par la section fédérale Commerce et VRP de la FEC-FO et le syndicat FO du Commerce du Nord – détaillait ses revendications et construisait un rapport de force. La direction voulait que les discussions sur le transfert passent uniquement par trois réunions de CSE. Mais de notre côté, il était hors de question de ne pas nous battre pour nos conditions de travail en vue de l'arrivée dans cette nouvelle boîte. D'autant que nous n'avons eu aucune information!
Dans un courrier, la section FO précise les revendications : le maintien des acquis sociaux et de l'accord de 2016 concernant notamment le temps de travail et la rémunération. Concernant les primes de transfert, nous avons calculé une moyenne de 50 000 euros, par salariés
, détaille Nordine Ouali. Au total, le montant mobilisé pour cette prime serait de 15 millions d'euros.
Entre 15 et 20 euros par année d'ancienneté
Les salariés ont alors lancé une mobilisation pour contraindre la direction à ouvrir des négociations en bonnes et dues formes. Plusieurs actions ont eu lieu à partir du 5 mars à l'extérieur de l'entreprise, notamment avec des barrages filtrants. Et cette mobilisation a été marquée par des tensions, avec des visites répétées d'un huissier de justice.
La direction nous a proposé d'ouvrir des négociations à condition que nous arrêtions les actions. Nous avons refusé de céder à ce chantage.
La direction se tourne alors vers la justice et le 12 mars, six salariés dont deux délégués et deux adhérents FO sont assignés au tribunal. La justice a interdit toute action à l'extérieur de l'entreprise, avec une amende de 420 euros par fait et par salarié
, indique le militant, indigné. Un rassemblement de soutien envers les salariés mis en cause s'est tenu devant le tribunal le 14 mars.
Le même jour, une première réunion a finalement lieu entre les syndicats et la direction. Mais une proposition de cette dernière n'a fait que raviver la colère. Si nous avons obtenu le maintien de nos acquis, la direction n'a proposé que 1 400 euros de prime de transfert par salariés!
, s'indigne Nordine Ouali. On parle de salariés avec 20 ans d'ancienneté pour les plus jeunes, jusqu'à 40 ans pour les plus âgés. Ça revient à leur donner entre 15 et 20 euros par année d'ancienneté. C'est tellement méprisant.
La colère face au sentiment d'abandon
Un mépris qui vient s'ajouter à un sentiment d'abandon et de trahison. La Redoute c'est un peu une grande famille. Durant le Covid, les salariés, même ceux qui avaient des problèmes de santé ou fréquentaient une personne fragile, sont venus travailler
, rappelle le délégué FO. Autre signe de mépris : si la Redoute externalise les salariés du Quai 30, elle garde cependant les lieux et les machines. On se débarrasse de nous comme des malpropres.
La colère est d'autant plus présente que, fin janvier, La Redoute annonçait que ses comptes s'étaient enrichis de 44,5 millions d'euros. Il s'agit d'une partie des 180 millions d'euros qu'avait versés en 2014 le propriétaire d'alors, le groupe Kering dirigé par François-Henri Pinault. Cette enveloppe était destinée à financer des mesures sociales lors de la vente de l'entreprise qui s'était accompagnée de 1 178 licenciements.
Depuis, la famille Moulin-Houzé, qui détient notamment les Galeries Lafayette, a racheté La Redoute. Cette enveloppe de 44,5 millions d'euros devait être gardée jusqu'au 1er janvier 2025, elle a ensuite rejoint les comptes de l'entreprise. Un mois plus tard, on apprenait l'externalisation des emplois
, grince le militant.
Alors qu'une seconde réunion s'est tenue le 18 mars, les salariés du Quai 30 n'entendent rien lâcher. Et pour cause : la direction fait une proposition de prime de transfert limitée à 2 100 euros brut. Cela revient à des «miettes» ont réagi les salariés du site qui tous sont venus soutenir leurs représentants le jour de cette réunion. Et par ailleurs, si le piquet de grève a été levé, les salariés poursuivent les actions. Ainsi, les débrayages d'une heure ou deux se multiplient. La détermination, elle est là
, appuie Nordine Ouali.